Hon. NOURANE FOTSING

Alors oui, c’est pas facile pour les femmes de pouvoir se déployer, pourquoi parce qu’il y a plein de femmes déjà ; la société a tendance à stigmatiser un peu les femmes en se disant que les femmes ne sont pas assez efficaces, qu’elles ne sont pas rentables, elles ne sont pas « bancable», elles ne sont pas travailleuses, et puis voilà elles ont des charges en conséquence de qui elle destinée à rester au foyer, est- ce que c’est vrai tout ça ? Est-ce qu’on peut leur faire confiance ? C’est déjà ça, on est stigmatisée, mais en plus de ça, on a tendance à penser qu’ une femme entrepreneure ne le fait peut-être que pour nourrir sa petite famille, on ne les voit pas comme des grands leaders et des cheffes d’entreprises par conséquent, on est diminué également, ça c’est un véritable problème au Cameroun. Mais nous, du moins moi ! Je suis là pour le combattre pour prouver aux autres qu’en fait, c’est pas vrai et que c’est possible de devenir de grandes cheffes d’entreprises, et de créer de l’emploi, de mettre des gens au travail, et d’avoir une grande vision.

D’ailleurs on l’a vu au Cameroun aujourd’hui à la tête de Camtel c’est une femme qui est là et qui fait un travail excellent avec le projet « Blue » par exemple, donc lorsqu’on donne la chance aux femmes, quand on leur donne l’opportunité elles font de grandes choses et c’est tout ce qui nous manque en réalité, l’opportunité et la chance, la confiance de pouvoir montrer de quoi nous sommes capable.

Challenge International

A 33 ans, vous êtes aujourd’hui au Cameroun, une des plus jeunes Députée de la Nation. Qu’est-ce qui vous fait rentrer en politique alors vous êtes une femme d’affaires à la base ? Quels sont les projets qui vous tiennent à cœur pour changer la courbe de chômage des jeunes au Cameroun, surtout, leur donner de l’emploi durable ? Lesquels ?

Hon. NOURANE FOTSING

Alors pour répondre à la première question, qu’est ce qui me fait entrer en politique, il faut dire que j’ai été inspiré quelque part par le Président Cabral Libii, mais c’est surtout parce que je me suis rendu compte qu’il y a quelqu’un assis quelque part qui ne fait pas son travail et qu’il fallait que je fasse ce travail là pour que les choses avancent. Principalement la problématique des jeunes c’est le chômage- c’est l’un de mes plus gros combats que j’ai pris à cœur. Aujourd’hui, les jeunes se plaignent énormément, tout ce que vous voyez dans les réseaux sociaux, et ce trop-plein, c’est parce qu’on est en face du chômage. Si on est occupé, on ne se met pas à tirer sur tout le monde, on ne se plaint pas, on se concentre dans son travail c’est un gros problème aujourd’hui au Cameroun sur une population pratiquement 70% de jeunes, pratiquement tous cherchent le travail, je parle d’au moins dix millions de Camerounais qui sont en âge de chercher le travail et il y en a pas. La fonction publique c’est les 400 000 emplois, le privé 900 000 emplois et le reste ils font comment ? Il faut créer de l’emploi, il faut que l’Etat puisse nous encourager nous les jeunes à pouvoir le faire. Alors s’il n’y a pas un porte étendard, s’il y a pas quelqu’un qui prend vraiment sur lui et dire que moi je vais la défendre cette jeunesse là et je vais me battre pour elle, moi je pense que je peux endosser ce rôle, je l’endosse et je l’endosserais toujours jusqu’à ce que mon but soit atteint.

Alors pour les projets concrets sur le terrain, tout démarre du fait que je me suis rendu compte lorsque j’ai voulu lancer mes micro-projets, qu’est-ce qu’il faut que je fasse ? Je me suis dit, qu’il fallait que j’occupe les jeunes, il faudrait que je puisse créer cet emploi-là, et donc j’ai décidé de former les jeunes en agriculture, en aquaculture, en pisciculture ; Tout s’est bien passé- on a formé 30 personnes au total. Il faut que je vous dise d’abord, dès qu’on avait lancé des candidatures, on a reçu 2000 postulants, or on ne pouvait prendre que 30, c’est vous dire à quel point les gens sont vraiment dans le besoin et après on les a accompagné avec du matériel et aujourd’hui presque tous sont indépendants, et s’ils ne sont pas à leur propre compte, ils travaillent pour quelqu’un. Fort de cet acquis favorable, on a lancé un deuxième projet où on formait vraiment en infographie, en web, en mastering, en management, en entrepreneuriat, ça a marché encore super bien, les gens voulaient et ils en avaient encore envie. Je me suis dit il faut peut-être valoriser ces métiers-là qui ne sont pas valorisés au Cameroun, il y a quelque chose à faire et en plus dans mon quotidien tous les jours j’ai des demandes d’emplois, en même temps quand je vais demander aux employeurs des profils parfois qu’on me demande n’existent pas dans ma base de données notamment bien sûr de bons électriciens, des bons plombiers, de bons menuisiers, de bons étanchéistes, donc c’était important de valoriser ça et donc je me suis rendu compte que les parents sont près à verser des sommes importantes pour que les enfants se reconvertissent à un métier malheureusement on a pas quelqu’un qui forme convenablement de manière descente et qui a un diplôme qui permet vraiment à compétir au niveau international et avoir des standings qui sont recherchés. J’ai donc décidé de valoriser ça et d’où est venu l’idée NIVETS (Nourishka International Vocational Educatin and Technical School) qui est donc cette école qui va former dans des métiers qu’on a tendance à appeler des sous- métiers, des petits métiers, qui ne le sont pas en réalité parce que lorsque vous avez un plombier qui vous fait une bonne installation il touche beaucoup plus qu’ un fonctionnaire ou un ingénieur. Quand vous avez quelqu’un qui vous pose des carreaux, bah ! moi j’ai fait poser des carreaux chez moi plus d’un million cinq (1 500 000) FCFA, donc il y a de l’argent dedans, mais il faut savoir les faire valoriser, donc nous on a décidé de créer cette école qui va former, il y a des cycles courts de six (06) mois, les cycles longs de un an, des cycles d’ un an et demi avec un diplôme. C’est plus des formations, c’est de la pratique c’est-à-dire que tu es vraiment formé à travailler tout suite, ce n’est pas de la théorie parce que de la théorie c’est bien mais il faut être capable

de faire.

Challenge International

Quel sont les conditions d’accès ? Est-ce que NIVETS (Nourishka International Vocational Education and Technical School) sera une école onéreuse ? Payante ou non payante ?

Hon. NOURANE FOTSING

Onéreuse c’est relatif, ça ne sera pas chère non plus.Quand vous faites un cycle dans une école de formation au Cameroun aujourd’hui, les trois ans cumulés pour avoir une Licence vous payez à peu près dans les minimum au plus bas mot autour de 1 500 000FCFA- ça c’est vraiment pour les écoles qui ne prennent pas de sous. Nous serons beaucoup plus en deçà de cette offre là, ça sera des prix corrects. Je tiens à dire que les gens ne vont pas entrer forcément en fonction de leurs diplômes, pas besoin d’avoir d’un diplôme x ou y.

Challenge International

Il n’y a pas un risque de conflit d’intérêt? Vous avez aujourd’hui votre boulot de Député de la Nation. A un moment on pourrait penser que vous avez puisé dans les caisses de l’Etat pour investir ? Comment est-ce que vous réglez ce problème-là ?

Hon. NOURANE FOTSING

Non mais c’est simple ! Le Député n’a pas accès à de l’argent, le Député est là pour voter des lois et contrôler l’action gouvernementale. Ceux qui ont accès à l’argent ce sont les Ministres de la République. Ce sont eux qui gèrent les budgets.

Challenge International

Quel est le coût de votre projet d’investissement NIVETS? Il est estimé à combien ?

Hon. NOURANE FOTSING

Il est estimé à peu près entre six et sept milliards, réalisable en trois voire quatre ans ; c’est-à-dire d’ici 2025, l’établissement sera ouvert.

Challenge International

Si vous aviez un message à adresser à la gente féminine qui souhaiterait se jeter dans l’entrepreneuriat tout court

Hon. NOURANE FOTSING

J’ai un message que je donne à tous les coups : il y a deux types de personnes, il y a des acteurs et des spectateurs, moi je suis une actrice, j’espère que vous allez faire comme moi ; autre chose quand vous pensez à un projet, pendant que vous êtes là à penser au projet, dites- vous qu’il y a une autre personne qui pense à la même chose que vous en même temps. Mais, la différence entre vous deux, c’est que lui il le réalise pendant vous vous restez toujours dans le rêve. Il faut passer à l’action pour être un acteur de sa vie et non pas un spectateur de sa vie.